La série Céleste s’inscrit dans une démarche expérimentale autour du médium photographique, à travers la réactivation d’un procédé chimique ancien : le mordançage.

Développée dans les années 1960 par Jean-Pierre Sudre, cette technique permet de modifier l’émulsion d’un négatif en provoquant le soulèvement partiel de la gélatine, principalement dans les zones de basses lumières. Les images présentées ici sont issues de négatifs initialement considérés comme non exploitables. Plutôt que de les écarter, ils sont volontairement soumis au processus de mordançage. Une fois la gélatine altérée, un travail manuel intervient : à l’aide d’un pinceau, l’émulsion est déplacée, remodelée, réinterprétée. Ce geste permet l’émergence d’une nouvelle image, hybride, oscillant entre disparition du sujet et apparition de formes inattendues. Le travail engage ainsi une réflexion sur la transformation de l’échec en potentiel créatif, sur la matière même de l’image et sa capacité à se renouveler en dehors de tout cadre figuratif. Le réel s’efface partiellement pour laisser place à une lecture plus ouverte, plus onirique. Les éléments du corps, du paysage ou de la texture s’entrelacent jusqu’à la confusion, générant une série de correspondances visuelles proches du tissu organique ou minéral. Céleste interroge les frontières entre figuration et abstraction, entre maîtrise technique et aléa chimique. Par le biais du mordançage, cette série propose une approche singulière de l’image photographique, envisagée non plus comme un enregistrement du réel, mais comme une matière vivante, à la fois fragile, mouvante et poétique.